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Bouazza Kherrati: «La hausse des prix a été accentuée par des facteurs internes»

Bouazza Kherrati: «La hausse des prix a été accentuée par des facteurs internes»

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Au micro de Ni9ach21, Bouazza Kherrati, président de la Fédération marocaine des droits du consommateur, se prononce sur les récentes manifestations contre la hausse des prix au Maroc.

Depuis quelques mois, les prix des produits alimentaires de bases et ceux des produits pétroliers ne cessent d’augmenter Maroc. Face aux nombreuses plaintes des populations, des ONG et des syndicats, le ministre délégué chargé du Budget, Faouzi Lekjaâ, a dû intervenir. Lors du point de presse suivant le Conseil de gouvernement de jeudi dernier, celui-ci a attribué, chiffres à l’appui, la hausse des prix au Maroc à «la reprise économique inattendue dans le monde» et à «l’augmentation continue des prix des céréales et des produits pétroliers sur le marché international».

Les explications de Lekjaâ ont-elles convaincu? Pas très sûr, quand on voit les manifestations qui se sont déroulées dimanche dernier dans les grandes villes du royaume, à l’initiative du Front social. A noter que la date choisie marquait le 11e anniversaire du mouvement de contestation «20 février». Des émeutes ont également eu lieu dans certains endroits, comme le souk d’Oulad Jelloul, dans la province de Kenitra.

La conjoncture internationale est-elle la principale raison de la hausse des prix au Maroc? Doit-on se satisfaire de la sortie du ministre délégué au Budget? Ni9ach21 a interrogé le président de la Fédération marocaine des droits du consommateur (FMDC), Bouazza Kherrati.

Ni9ach21: Quelle est votre position sur les manifestations du dimanche 20 février 2022?

Bouazza Kherrati: Certes, il y a eu des émeutes et des agressions contre des marchands, comme ce fut le cas au souk d’Oulad Jelloul. C’est ce que j’appelle la «siba économique». Mais en parallèle, il y a eu des manifestations sociales dans les grandes villes du royaume, dans le plus grand des esprits démocratiques. Suite à l’appel de certains syndicats, les citoyens se sont rassemblés pour manifester contre la hausse des prix, dans des conditions pacifiques, contrairement à ce qu’il s’est passé dans quelques souks. D’ailleurs, la Fédération marocaine des droits du consommateur condamne fermement tous ces actes de rébellion.

Selon vous, quelles sont les causes derrière la hausse des prix?

Outre la conjoncture internationale, il y a des facteurs internes qui ont accentué cette hausse des prix. Il s’agit des nombreux intermédiaires qui envahissent les différents marchés et secteurs. Pour rappel, ces intermédiaires ne payent aucun impôt et impactent durement aussi bien le producteur que le consommateur. Tant qu’il n’existe aucune instance nationale qui régit la consommation nationale, ce problème risque de s’aggraver. Il faut savoir que les intermédiaires profitent toujours des crises pour spéculer. Et ils s’activent pour les produits nationaux comme pour les produits importés.

Que pensez-vous des explications de Faouzi Lekjaâ?

Lekjaâ a voulu dire aux Marocains: «Contentez-vous de l’obole que nous vous donnons». A travers ses chiffres, le ministre délégué a voulu transmettre des messages que je trouve blessants et offensants pour les Marocains. Mais, il a omis de mentionner le prix des barils pendant l’année 2020. En effet, quand ceux-ci ne coûtaient que 22 $ de l’unité, le prix du litre au niveau des pompes du Maroc n’a aucunement baissé. Alors pourquoi quand le prix du pétrole augmente à l’échelle internationale, le marché local suit-il, et le contraire quand le prix du baril baisse? Où est le gouvernement? C’est ce que dénonce la FMDC.

Alors, comment protéger le consommateur marocain?

La FMDC tire la sonnette d’alarme sur la hausse des prix depuis août 2021. Dès que nous avons remarqué cette hausse des prix ainsi que l’érosion du pouvoir d’achat des citoyens, nous l’avons fait savoir à plusieurs reprises, et avons même proposé quelques solutions depuis l’été dernier. Aujourd’hui, quelques pays ont appliqué ces propositions, tels que la Pologne ou encore la Turquie. Il s’agit de la suppression de toutes les augmentations prévues dans la loi de finance 2022, la réduction de 50% de la TVA relative aux produits de premières nécessités ou encore le recours du gouvernement dans le cadre légal à l’article 4 de la loi sur la liberté des prix et de la concurrence. Ce dernier permet au gouvernement, en cas de crise, de faire appel au Conseil de la concurrence afin de fixer, pour une période de 6 mois, les prix qui ont connu une flambée.

Quel rôle peuvent jouer les organisations comme la vôtre?

Nous sommes une ONG apolitique et composée de volontaires. Nous n’avons aucun pouvoir, sauf celui de faire des propositions, lesquelles sont soit tenues en considération ou pas. Mais nous sommes une force de proposition et nous nous considérons comme faisant partie de la solution. Dans ce sens, nous intervenons par de la sensibilisation sur les dépenses illogiques ou le gaspillage alimentaire. A ce propos, rien qu’en matière du blé, près d’un quart des importations se retrouvent dans nos poubelles. Ce sont des milliards de dirhams gaspillés. Ainsi, le consommateur lui-même peut être un facteur de crise et c’est là que nous intervenons.

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