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Analyse. Sahara: quand l’Espagne s’en mêle (et pourquoi)

Analyse. Sahara: quand l’Espagne s’en mêle (et pourquoi)

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Après sa rencontre, mardi à Washington, avec le secrétaire d’État américain Antony Blinken, lors de laquelle la question du Sahara était au cœur des débats, le ministre espagnol des Affaires étrangères, José Manuel Albares, devait tenir, ce vendredi, une réunion avec l’envoyé spécial de l’ONU, Staffan de Mistura. Qu’est-ce que cela présage? Eléments de réponse.

Jusque-là, et ne serait-ce qu’officiellement, l’Espagne s’est gardée de prendre une quelconque initiative sur le dossier du Sahara marocain et le conflit qui y oppose le royaume à son voisin algérien et autres affidés du front Polisario. Mais à voir les «moves» de ces derniers jours de la diplomatie espagnole, ça, c’était avant.

Deux récentes annonces plaident pour un changement de posture du voisin du nord sur ce registre. La première n’est autre que la réunion, mardi dernier à Washington, du ministre espagnol des Affaires étrangères, José Manuel Albares, avec le secrétaire d’État américain, Antony Blinken. Les deux parties y avaient convenu d’«unir leurs forces pour résoudre ce conflit qui dure depuis trop longtemps et pour lequel une solution doit être trouvée».

Le second est la rencontre attendue ce vendredi 21 janvier à Madrid, entre le même MAE espagnol et le nouvel envoyé spécial de l’ONU pour le Sahara, Staffan de Mistura. Ce dernier vient, d’ailleurs, d’achever une visite dans la région (Rabat, Tindouf, Alger et Nouakchott).

On l’aura compris, Madrid ne compte plus rester les bras croisés sur un dossier qui concerne une de ses anciennes colonies et entend jouer un rôle dans sa résolution. Tout est de savoir pourquoi maintenant et, surtout, dans quel sens la diplomatie espagnole entend agir.

Pour l’expert en relations internationales Mohamed Chaquir, l’Espagne semble avoir compris la leçon après les récentes tensions nées avec le Maroc des suites de l’accueil que Madrid a réservé au chef séparatiste Brahim Ghali sur son sol. «Le Maroc a été clair: pour des relations apaisées et durables avec les partenaires européens, en tête desquels l’Espagne, il fallait que ceux-ci sortent de la zone grise, et toute coopération entre Rabat et Bruxelles qui n’inclurait pas les provinces du sud est nulle et non avenue», rappelle-t-il.

Une telle position, doublée du gel (de facto) par le Maroc de ses relations avec le voisin ibérique sont autant de facteurs de pression auxquels Madrid tente de réagir, en multipliant les gestes amicaux et les déclarations de bonnes intentions envers Rabat. «Tout en préservant l’Algérie dont elle dépend en matière d’énergies fossiles, l’Espagne suggère s’aligner sur la position marocaine ou, du moins, affirme vouloir tourner la page du double-jeu d’hier», analyse Chaquir.

La question est: que gagne le royaume, et le jeu de l’Espagne ne cacherait-il pas une volonté de nuire, ou parasiter, la stratégie marocaine? «Aucunement! Ce sont là des gestes allant dans le sens de la volonté de notre pays. Madrid fait tout pour rétablir des liens solides avec le Maroc. La rupture actuelle la dessert à plus d’un titre et le coût tant politique que sécuritaire et économique est bien trop élevé», explique cette source.

Mais que l’on ne s’y trompe pas. «La nouvelle attitude de l’Espagne relève, toujours, de la déclaration d’intention et du discours théorique. Il n’y a toujours pas d’action concrète», nuance notre interlocuteur. Et d’émettre l’espoir que les choses vont bouger, au vu des pourparlers en cours entre l’Espagne et l’Allemagne, première puissance européenne qui, elle, a clairement fait le choix du Maroc en appuyant le plan d’autonomie et en invitant le souverain à se rendre à Berlin. «Tout porte à croire que Madrid va s’y résoudre également et marchera sur les pas de l’Allemagne», nous dit-il.

L’analyste politique Abdelaziz Koukas abonde dans le même sens en écartant toute mauvaise intention derrière cet «entrisme» espagnol. «Les rencontres avec, d’une part, le chef de la diplomatie américaine qui reconnait la souveraineté marocaine sur le Sahara, et, d’autre part, le représentant du SG de l’ONU, qui a totalement écarté toute option de référendum d’auto-détermination de son logiciel, valent l’appui de l’Espagne vis-à-vis du Maroc. Ce qu’il faut, c’est plus de clarté et de courage», nous explique-t-il. Amen!

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