Le président de la Guinée, Alpha Condé, a été renversé par un coup d’Etat, dimanche 5 septembre 2021. Au même moment, les Lions de l’Atlas se trouvaient dans le pays…
Sans prévenir, un nouveau coup d’Etat en Afrique. La Guinée a changé de visage en une journée. Tout est allé très vite. Ce dimanche 5 septembre, Alpha Condé, à la tête du pays ouest-africain depuis décembre 2010, a été renversé par un putsch militaire. Les habitants de Conakry se sont réveillés au son de tirs nourris et à l’arme lourde qui ont éclaté aux alentours de 8h près de «Sékhoutouréya», le palais présidentiel où se trouvait le chef de l’Etat. Les affrontements se sont poursuivis toute la matinée.
Le putsch a été mené par le Groupement des forces spéciales (GFS), fondé par… Alpha Condé lui-même. A sa tête: le lieutenant-colonel Mamady Doumbouya. Dès l’après-midi, apparaissant à l’antenne de la RTG (la radio-télévision nationale), le drapeau guinéen sur les épaules, celui-ci a annoncé l’arrestation du président, ainsi que la dissolution des institutions et la suspension de la Constitution. Un événement qui arrive après celui de l’année dernière au Mali. Le nouvel homme fort de la Guinée est, d’ailleurs, soupçonné d’avoir des contacts avec Assimi Goïta, auteur du coup d’Etat militaire dans le pays voisin.
Le mandat de trop?
Originaire de la région de Kankan (est de la guinée), Mamady Doumbouya a suivi sa formation à l’École de guerre à Paris, ainsi qu’en Israël, au Sénégal et au Gabon. Au cours de sa carrière, il a servi dans des pays comme l’Afghanistan, la Côte d’Ivoire et la République centrafricaine. Membre de la Légion étrangère française, il a été rappelé pour commander le GFS, qui a pour mission officielle de lutter contre le terrorisme. C’est en 2018 que les Guinéens l’ont découvrent, paradant avec sa nouvelle unité, lors du défilé militaire de la fête de l’indépendance.
Ce dimanche, Alpha Condé est donc tombé, dans la première année de son troisième mandat à la tête de la Guinée. Un mandat jugé «de trop» par beaucoup. En effet, en 2020, l’octogénaire a été réélu dès le premier tour (59,5 % des suffrages), à la suite d’une révision constitutionnelle controversée. Cette dernière avait provoqué une vague de protestations en Guinée, faisant des dizaines de morts. Après son arrestation, Condé a été mis en résidence surveillée. Au même moment, des images ont fait le tour de la toile, le montrant avec une chemise déboutonnée, entouré d’hommes armés.
Condamnations à la chaîne
Comme il fallait s’y attendre, les réactions n’ont pas tardé suite au coup de force en Guinée. Dimanche, dans un communiqué conjoint, le président de l’Union africaine (UA), Félix Tshisekedi, et le président de la Commission de l’UA, Moussa Faki Mahamat, ont condamné le coup d’Etat. Demandant la libération immédiate d’Alpha Condé, ils ont invité le Conseil de paix et de sécurité de l’UA à «prendre les mesures appropriées aux circonstances».
Même son de cloche du côté de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO). Outre la «libération immédiate et sans condition» du président guinéen, l’organisation sous-régionale a demandé aux forces de défense et de sécurité guinéennes de «demeurer dans une posture républicaine» et exigé «le retour à l’ordre constitutionnel sous peine de sanction».
L’organisation des Nations unies n’a pas été en reste. «Je condamne fermement toute prise de pouvoir par la force des armes et je demande la libération immédiate du président Alpha Condé», a déclaré sur Twitter son secrétaire général, António Guterres. D’autres réactions ont abondé dans le même sens.
I am personally following the situation in Guinea very closely. I strongly condemn any takeover of the government by force of the gun and call for the immediate release of President Alpha Conde.
— António Guterres (@antonioguterres) September 5, 2021
L’après
Le calme est revenu en Guinée, et le monde attend de voir la direction que vont prendre les choses. Après leur coup de force, les putschistes ont affirmé vouloir «mettre fin au mal guinéen». Et leurs premières décisions sont déjà tombées, notamment l’instauration d’un couvre-feu dans toute la Guinée «jusqu’à nouvel ordre». Les putschistes ont également annoncé le remplacement des gouverneurs et préfets dans les régions par des militaires.
Ce lundi, les fonctionnaires ont été appelés à reprendre le travail. Quant aux ministres sortants et les présidents des institutions, ils ont été convoqués à une réunion prévue ce lundi à 11h (GMT). Et la consigne était claire: ceux qui ne répondront pas à la convocation seront considérés comme «en rébellion contre le Comité national du rassemblement et du développement (CNRD)».
Au mauvais moment au mauvais endroit?
Au moment où le coup d’Etat se déroulait en Guinée, l’équipe nationale de football du Maroc se trouvait dans ce pays. Les Lions de l’Atlas devaient affronter, ce lundi à Conakry, l’équipe nationale guinéenne pour le compte de la 2e journée des éliminatoires africaines de la Coupe du monde 2022. Au vu de la situation, la Confédération africaine de football (CAF) et la Fédération internationale de football association (FIFA) ont décidé le report de la rencontre qui ne pouvait donc avoir lieu.
Mais plus de peur que de mal pour Vahid Halilhodžić et ses hommes, qui étaient confinés dans leur hôtel, pas très loin du théâtre des tirs. «On est à l’hôtel, on entend des coups de feu à côté toute la journée. On attend la permission pour partir à l’aéroport. Pour l’instant, on est bloqués. Un avion nous attend, mais on n’a pas la permission de partir», avait confié le sélectionneur national à L’Equipe. Heureusement, la situation s’est réglée, et l’équipe nationale et le staff technique ont pu embarquer. Leur avion a quitté Conakry à destination du Maroc, dimanche soir, a fait savoir l’ambassade du Maroc en Guinée.
