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Contrairement à l’Egypte et la Tunisie, le Maroc a renversé les islamistes, les urnes comme arme

Contrairement à l’Egypte et la Tunisie, le Maroc a renversé les islamistes, les urnes comme arme

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Le Parti de la justice et du développement (PJD), qui avait remporté 125 sièges parlementaires en 2016, a reçu une claque aux élections législatives de 2021. Son grand rival, le Rassemblement national des indépendants (RNI), a pris le lead.

Le RNI est arrivé en tête des élections législatives avec 102 sièges. Les 2e et 3e places sont occupées respectivement par le Parti authenticité et modernité (PAM), avec 86 sièges, et le Parti de l’Istiqlal (PI), avec 81 sièges. L’Union socialiste des forces populaires (USFP) est, lui, arrivé quatrième, avec 35 sièges.

Avec 29 sièges, le Mouvement populaire (MP) est arrivé cinquième. Il est suivi par le Parti du progrès et du socialisme (PPS, 22 sièges) et l’Union constitutionnelle (UC, 18). Le PJD a dégringolé au bas du tableau avec 13 sièges, tandis que les autres partis ont hérité des 10 sièges restants.

Pour certains observateurs politiques, ces résultats annoncent officiellement l’effondrement du PJD. Le parti proche des Frères musulmans dominait la scène politique depuis une décennie.

Le Maroc tourne la page des Frères musulmans par les urnes

Hanane Rehhab, ex-parlementaire USFP, a annoncé sur sa page Facebook que «le Maroc constitue désormais une exception, par la manière avec laquelle les Frères musulmans ont été chassés du pouvoir, sachant qu’en Égypte, l’armée a dû intervenir pour renverser la confrérie, et qu’en Tunisie, Kaïs Saïed a coupé la route au mouvement islamiste Ennahdha. Au Maroc, ils ont été chassés grâce à la volonté du peuple, la démocratie et les urnes, après 10 ans de vaches maigres».

Quant à Mohamed Chakir, analyste politique et expert en droit constitutionnel, il a souligné, dans une interview à Ni9ach21, que «le système politique marocain diffère de ceux adoptés en Egypte et en Tunisie, car la composante islamique a été utiliée pour surmonter l’étape du mouvement (20 février, ndlr) et mettre en œuvre des décisions impopulaires. Cela a affecté l’élan populaire des islamistes, d’autant plus que le parti n’est pas expérimenté et que ses cadres ne disposent pas de connaissances suffisantes pour gérer les affaires publiques».

Du même avis, Mostafa Ibnerradi, journaliste à Al Arabi 21, a ajouté que «le Maroc n’a pas eu besoin de passer par la manière forte pour sceller l’avenir des islamistes, comme cela s’est produit dans de nombreux pays. ls sont entrés par les urnes et ont été dégagés par les urnes».

Les leçons à retenir

Egalement interrogé par Ni9ach21, le militant amazigh Saïd El Ferouah a estimé qu’il qu’on doit tirer des leçons de cette expérience électorale exceptionnelle, «loin de la logique de remise en cause des résultats et des moyens utilisés par le RNI». «Ceux qui veulent gagner les élections de 2026 doivent se mettre au travail dès maintenant, en renforçant l’organisation de leur parti, et en se mettant au service des citoyens. Il ne doivent pas les négliger jusqu’en 2026 et, après, venir demander leurs votes», a-t-il fait remarquer.

«Le déclin électoral du PJD ne s’est pas reflété seulement dans le nombre de sièges obtenus par le parti, mais aussi dans la défaite électorale de son secrétaire général et chef du gouvernement dans une circonscription (Rabat-Océan). Cela ne peut s’expliquer que par sa mauvaise gestion du parti», a observé Chakir. Le résultat obtenu par le PJD est, selon lui, dû à «des décisions impopulaires qui ont affecté les travailleurs, de même que la stratégie politique poursuivie par le parti, alors que ses membres et dirigeants se sont transformés en opportunistes qui tirent avantage des sièges qu’ils occupent».

Le PJD, le plus grand bénéficiaire du nouveau quotient électoral

Abdelmounaïm Lazar, professeur de sciences politiques et de droit constitutionnel à la Faculté de droit de Souissi, à Rabat, parle, lui, d’une ironie. «Les Partis politiques qui ont défendu la nouvelle formule de calcul du quotient électoral, en se basant sur le nombre d’électeurs, ont vu leurs résultats être affectés par ce choix. Si l’ancienne formule avait été conservée, le RNI, le PAM et le PI auraient obtenu plus». Ainsi, ajoute-t-il, le PJD, qui s’opposait, au début, à l’adoption de la nouvelle formule de calcul du quotient électoral, en a plus bénéficié par rapport aux autres partis.

«L’État a pris toutes les dispositions nécessaires pour contrôler les volumes électoraux, pour empêcher la « non-inflation » des votes au profit d’un seul parti. Mais il semble que l’horizon populaire s’est rétréci plus que prévu pour un parti, qui a investi plus dans des valeurs que dans des réalisations», souligne, néanmoins, Ibnerradi, faisant référence au PJD.

La colère des PJDistes contre leur chef

Après la défaite retentissante du parti dans les élections du 8 septembre, Abdelilah Benkirane, ancien chef du gouvernement, et Amina Maelainine, leader et ex-parlementaire du PJD, ont demandé à Saad Dine El Otmani de démissionner du secrétariat général du parti islamiste.

Sur Facebook, Maelainine a déclaré:«les résultats sont choquants, durs et inattendus, même pour les plus pessimistes. (…) Le parti doit admettre sa défaite et il doit analyser avec audace et courage les causes de cette défaite».

«Les Marocains ont sanctionné le PJD. C’est une réalité qu’il faut admettre avant toute réconciliation avec les Marocains et avec soi. Réfléchissons au nombre de voix et au comportement des électeurs dans les villes, en particulier le quartier de l’Océan à Rabat. Les gens ont estimé que le parti avait abandonné les vraies batailles et sa politique est devenue silencieuse et hésitante sur la plupart des questions fondamentales. Par conséquent, le parti a été abandonné à son tour», a-t-il ajouté.

A son tour, Abdelilah Benkirane, a publié une lettre manuscrite sur sa page Facebook: «après avoir appris la douloureuse défaite que notre parti a subi lors des élections des membres de la Chambre des représentants, j’estime que le plus approprié pour notre parti dans ces circonstances difficiles est que le secrétaire général assume sa responsabilité et présente sa démission de la direction du parti».

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