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Story. La révolution du roi et du peuple

Story. La révolution du roi et du peuple

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Décembre 1952 marque un tournant important dans l’histoire du Maroc. Ce mois-là, des émeutes ont lieu dans le royaume. Démarrant dans le quartier des «Carrières centrales», dont ils porteront le nom par la suite, ces événements marqueront l’Histoire du Maroc.

Les 7 et 8 décembre de cette année, le parti de l’Istiqlal et l’Union générale des syndicats marocains revendiquent, main dans la main, l’indépendance du pays. Ils partiront d’une protestation suivant la mort de Ferhat Hached, secrétaire général de l’Union générale du travail en Tunisie, survenue le 5 décembre 1952.

Les émeutes s’étendent dans la ville de Casablanca. La Légion étrangère et l’armée tirent sur la foule. Bilan: 100 à 300 morts, selon les historiens. Les chefs de l’Istiqlal sont alors arrêtés par le général Augustin Guillaume, résident général au Maroc de juillet 1951 à juin 1954.

Puis viennent les 16 et 17 août 1953, lorsque des affrontements éclatent au niveau d’Oujda, Berkane et Tafoughalt, entre nationalistes et occupants. Il s’agit de la première véritable lueur d’espoir et de la première pierre à l’édifice de la Révolution du roi et du peuple.

La région de l’Oriental a bien organisé ce soulèvement, faisant participer l’ensemble des couches sociales afin de redonner au Trône alaouite ses lettres de noblesse. Les populations de l’Oriental visent, en priorité, les chemins de fer, les casernes militaires et la centrale électrique. Faisant face aux balles des forces françaises, de nombreux nationalistes y laissent la vie, quand d’autres sont arrêtés.

Quelques jours plus tard, soit le 20 août, le sultan légitime du Maroc, Mohammed Ben Youssef, est déposé par les colons français, qui le remplacent par Mohammed Ben Arafa sur le Trône. Un geste qui choque profondément les citoyens marocains.

Commencent alors les boycotts des entreprises françaises, les manifestations de soutien au sultan légitime du Maroc, les grèves dans des secteurs importants de l’économie coloniale. La résistance connaît alors de nombreux martyrs, tels que Allal Ben Abdellah, qui a tenté d’assassiner Mohammed Ben Arafa.

Sous pression face à une colère populaire qui ne cesse de s’accroître, l’occupant doit réagir. Le général Augustin Guillaume contraint Mohammed Ben Youssef à s’exiler en Corse, puis à Madagascar (Antsirabe) en 1954.

Un sultan sur la lune

Loin de son sultan, le peuple organise des mouvements de résistance afin de soutenir le retour de celui-ci. Les rassemblements sont presque quotidiens et des milliers de Marocains le confirment: ils ont «vu le sultan sur la lune, sur un cheval blanc»…

Il s’agit en fait d’une astuce empruntée aux Allemands, plus précisément à Otto von Bismarck, homme d’Etat connu pour avoir été le réunificateur de la nation allemande à la fin du XIXe siècle.

Le peuple marocain avait reçu des photos imprimées du sultan sur un cheval blanc, avec pour instruction de regarder la photographie durant plusieurs secondes, avant de lever immédiatement les yeux au ciel, vers la lune. Les Marocains ont donc, grâce à un phénomène de persistance rétinienne, «vu» le sultan sur la lune.

Début des négociations

La France voulait éloigner le sultan de son pays afin d’amincir sa popularité, mais c’est l’effet contraire qui se produit. En plus de ne jamais accepter Ben Arafa comme sultan légitime, décrit comme un pantin des colons, le peuple se soude derrière son réel souverain.

Parallèlement aux soulèvements marocains, l’occupant français essuie une défaite à la bataille de Diên Biên Phu, lors de la guerre d’Indochine (20 novembre 1953-7 mai 1954). Pis, non loin du Maroc, les colons français doivent gérer l’éclatement de la guerre d’Algérie, qui se soldera en 1962 par la reconnaissance de l’indépendance du pays voisin.

Ces événements poussent les Français à débuter les négociations avec le sultan Mohammed Ben Youssef, précisément à partir de février 1955. Toutefois, celles-ci se soldent par un échec, car largement injustes envers la famille régnante marocaine.

L’occupant avait proposé au sultan deux solutions: l’abdication et le retour à la mère patrie sous protection française pour lui et l’ensemble de sa famille, ou le durcissement de ses conditions de vie pendant l’exil. Face à ce chantage effronté, le sultan a tout bonnement refusé.

Les citoyens marocains s’organisent alors en armée de libération. Cette dernière a été créée par le Comité de libération du Maghreb arabe au Caire, afin d’organiser les mouvements de résistance marocain et algérien.

Les combattants marocains lancent leurs premières opérations le 1er octobre 1955 au niveau d’Aknol, d’Imozar, de Marmoush et de Tétouan. Là où se trouvent justement le quartier général du commandement général du protectorat ainsi que le centre de formation des officiers.

Parallèlement, le peuple poursuit ses manifestations, toujours accompagné par le parti de l’Istiqlal et soutenu par Front de libération nationale algérien, le royaume de Libye et l’Égypte de Gamal Abdel Nasser.

Face à une situation devenue ingérable, la France rappelle le sultan le 6 novembre 1955 afin d’entamer de vraies négociations, cette fois-ci, concernant une transition vers l’indépendance. Cette rencontre se conclut par les «accords de La Celle-Saint-Cloud».

Le 16 novembre 1955, le sultan et sa famille reviennent à Rabat et sont acclamés par une foule en joie. Et Mohammed Ben Youssef devient le roi Mohammed V du Maroc.

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